Vous avez aimé la dernière tarte aux cerises que vous avez achetée au supermarché et vous voulez vous essayer à sa fabrication ? Pas de problème, voici comment faire, c’est enfantin.
La recette ci-dessous a été rédigée par Claude Bourguignon, un ingénieur agronome, spécialiste de la microbiologie des sols. Il est en quelque sorte extrait de « Notre poison quotidien », un film de Marie-Monique Robin, qui sera diffusé sur Arte le 15 mars prochain à 20h40.
Vous en aurez l’eau à la bouche. Lisez plutôt ci-dessous…
D’abord la pâte
Pour obtenir la farine, enrobez, avant semis, vos grains de blé d’un fongicide. Pendant la culture du blé, vous lui assurerez entre deux et six traitements de pesticides, un traitement aux hormones pour raccourcir les tiges, et vous n’oublierez surtout pas de répandre une dose importante d’engrais. Vous pouvez par exemple considérer que 240 kg d’azote, 100 kg de phosphore et 100 kg de potassium conviennent parfaitement par hectare.
Après les moissons, vous fumigerez les grains dans le silo au tétrachlorure de carbone et au bisulfide de carbone. Et puis, vous les arroserez de chlopyriphosméthyl.
Pour la mouture, n’oubliez pas de mélanger la farine avec du chlorure de nitrosyl, de l’acide ascorbique, de la farine de fève, du gluten et de l’amylase.
Ensuite, pour faire lever la pâte, utilisez de la poudre levante traitée au silicate de calcium. Et pensez à blanchir l’amidon au permanganate de potassium.
Pour éviter le rancissement, traitez les corps gras avec un antioxydant comme l’hydroxytoluène de butyl, ainsi qu’un émulsifiant de type lécithine.
La crème
Votre pâte est prête. Penchons-nous maintenant sur la crème.
Elle se fait avec des œufs, du lait, et de l’huile. Que des produits naturels !
Les œufs :
Les œufs peuvent parfaitement provenir d’un élevage industriel, où les poules sont nourries avec des granulés contenant des :
- Antioxydants (E300 à E311)
- Arômes
- Emulsifiants, comme l’alginate de calcium
- Conservateurs, comme l’acide formique
- Colorants, comme la capsanthéine
- Agents liants, comme le lignosulfate
- Appétants, comme le glutamate de sodium (pour aider les poules à avaler tout ça…
Pensez à donner aussi des antibiotiques, bien entendu, et surtout des anticoccidiens.
Avant séchage, les œufs recevront utilement des émulsifiants, des agents actifs de surface (comme l’acide cholique) et une enzyme pour retirer le sucre du blanc.
Le lait :
Le lait provient d’un élevage industriel où les vaches reçoivent une alimentation particulièrement riche en produits chimiques :
- Des antibiotiques, comme le flavophospholipol (F712) ou le monensin-sodium (F714)
- Des antioxydants, comme l’ascorbate de sodium (F301), l’alphatocophérol de synthèse (F307), le buthyl-hydrox-toluène (F321) ou l’éthoxyquine (E324)
- Des émulsifiants : alginate de propylène-glycol (F405) ou polyéthylène glycol
- (F496)
- Des conservateurs, comme l’acide acétique, l’acide tartrique (E334), l’acide propionique (F280) et ses dérivés (F281 à E284)
- Des composés azotés chimiques, comme l’urée (F801) ou le diurédo-isobutane (F803)
- Des agents liants, comme le stéarate de sodium
- Des colorants, comme le F131 ou le F142
- Et bien sûr et à nouveau des appétants, comme le glutamate de sodium, pour que les vaches puissent manger tout ça.
Les huiles :
Les huiles, quant à elles, ont été :
- Extraites par des solvants comme l’acétone
- Raffinées par action de l’acide sulfurique
- Lavées à chaud
- Neutralisées à la lessive de soude
- Décolorées au bioxyde de chlore ou au bichromate de potassium
- Désodorisées à 160°C avec du chlorure de zinc
- Recolorées à la curcumine.
Vous avez donc tous les éléments naturels pour fabriquer la crème. C’est facile, vous mélangez les œufs, le lait et les huiles. Ensuite, vous rajoutez des arômes et des stabilisants comme l’acide alginique (E400).
Cerise sur le gâteau
Il manque bien sûr les cerises…
Les cerisiers auront reçu pendant la saison entre dix et quarante traitements de pesticides.
Une fois cueillies, les cerises sont :
- Décolorées à l’anhydride sulfureux
- Recolorées de façon uniforme à l’acide carminique ou à l’érythrosine
- Plongées dans une saumure contenant du sulfate d’aluminium
- Imbibées d’un conservateur comme le sorbate de potassium (E202).
- Enduites d’un sucre qui provient de betteraves qui, comme les blés, ont reçu leur bonne dose d’engrais et de pesticides.
A noter que ce sucre est extrait par :
- Défécation à la chaux et à l’anhydride sulfureux
- Puis décoloré au sulfoxylate de sodium
- Puis raffiné au norite et à l’alcool isopropylique.
- Il est enfin azuré au bleu anthraquinonique.
Vu que par ces traitements, les cerises ont donc perdu tout leur goût, il est nécessaire d’ajouter un parfum artificiel alimentaire. Ce parfum est une recréation synthétique du goût et de l’odeur à partir d’éléments artificiels issus de la chimie du pétrole aux prix de revient extrêmement faibles, en comparaison du parfum naturel de fruit.
Le parfum artificiel de cerise se compose des molécules synthétiques suivantes :
- Acétate d’éthyle
- Acéthyl méthylcarbinol
- Butyrate d’isoamyle
- Caproate d’ethyle
- Caprylate d’isoamyle
- Caprate d’ethyle
- Butyrate de terpenyle
- Geraniol
- Butyrate de geranyl
- Acetylacetate d’ethyle
- Heptanoate d’ethyle
- Aldéhyde benzoïque
- Aldéhyde pétoluique
- Vanilline
- Essence artificielle d’amande amère SAP
- Essence artificielle de girofle Bourbon
- Essence artificielle de cannelle Ceylan
- Essence de lie de vin.
Vous avez tout. Il ne nous reste plus qu’à vous souhaiter un excellent appétit !