Le spectacle quotidien de la Stib

Posté le 9 mars 2011 dans Divers

La réunion s’éternisait. Les administrateurs étaient fatigués, mais ils s’étaient promis de ne se quitter que lorsqu’ils auraient trouvé une solution à leur problème. Et ce problème était de taille : comment inciter la population à prendre davantage les transports en commun ?
Des idées, ils en avaient eues. Mais aucune qui soit suffisamment percutante. Tout d’un coup, dans le silence pesant qui marquait les limites d’un brainstorming infructueux, une voix claqua : « Les spectacles !… » Tout le monde se retourna vers l’auteur de cette exclamation. C’était un jeune, à l’évidence le plus jeune parmi tous ces vieux administrateurs. Un nouveau. Le président le toisa du regard et lui demanda de s’expliquer. « Eh bien, c’est très simple. Dans notre ville, il y a souvent des spectacles le soir. Dans pas mal de salles. Repérons les salles et les spectacles, et faisons en sorte que les soirs où il y a des spectacles, les transports en commun soient bien desservis. C’est très simple, non ? Ça aura le mérite de faciliter les transports, et ça favorisera la promotion de nos services… »

Les administrateurs regardèrent ce jeune ambitieux. Comment se fait-il qu’ils n’avaient pas eu eux-mêmes cette brillante idée ? Peut-être parce qu’ils ne vont jamais aux spectacles… Ou sans doute aussi parce qu’ils ne prennent jamais les transports en commun.

Cette séance de conseil d’administration se passe dans une ville inconnue et est parfaitement imaginaire. Elle n’a en tout cas encore jamais eu lieu à Bruxelles, dans les locaux de la Stib. Des spectacles, à Bruxelles ? Ah il y en a ? Et des spectateurs sans voiture aussi ? Ça alors… Hier soir, le bus 54 – un busseke – avait une douzaine de minutes de retard sur son horaire affiché « en temps réel » sur Internet. A l’arrêt, nous étions plusieurs à nous en inquiéter. Peut-être a-t-il été détourné vers la Tchétchénie. Ou bien est-il pris dans la tempête de neige du sud de Bruxelles. Ou encore le chauffeur est-il en train de se battre avec une vieille qui l’agressait… Il finit quand même par arriver. Complètement plein, bourré. Je parle du bus, pas du chauffeur. Mais que font tous ces gens dans un busseke à 23 heures, mes amis ? Ils reviennent d’un concert. La Stib semble ignorer que sur le trajet de son bus 54, il y a une salle de spectacles de 8.400 places. Dès lors, on peut imaginer facilement le pauvre busseke stopper à un arrêt où plusieurs centaines de personnes se pressent. Ça met du temps à charger, tous ces gens-là. Et à chaque arrêt, c’est une litanie de pardons et d’écrasements de pieds stressés.

Dans le bus, ça parlait toutes les langues. Il paraît en effet qu’une grande majorité d’expats – vous savez, ces gens qui généralement ont de super salaires à Bruxelles – n’ont pas de bagnole. Je ne comprends pas l’allemand, le suédois ou le tchétchène. Mais je parie que tous ces gens parlaient du fait d’acheter une voiture…
Bref, vous savez quoi ? Avec la Stib, il y a du spectacle tous les jours…

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