Ouvrir les yeux

Posté le 11 août 2011 dans Divers

Quand bien même on pourrait le croire, ceci n’est pas un billet sur la Stib !
J’étais ce soir sans pluie à l’arrêt de bus. Trois minutes d’attente, tout va bien. Une voiture s’arrête. Le passager est en grande discussion avec le conducteur. Il le remercie chaleureusement et descend. Il a une canne blanche. Il tâtonne le trottoir et va de l’avant. Je lui demande s’il veut de l’aide. Il me répond qu’il doit aller de l’autre côté, mais qu’il trouvera bien des âmes charitables pour l’aider à traverser. Il ne veut surtout pas me faire rater mon bus. Je l’accompagne jusqu’au passage piétons, et là, il y va de sa grande voix. Sans hésiter. Quelqu’un peut m’aider s’il vous plaît ? On entend – oups, j’avais écrit « on voit »… – qu’il a l’habitude. Tout de suite un jeune lui répond. Un de ces jeunes qu’on pourrait croire dans les émeutes de Birmingham. Avec un grand sourire, il le prend par le bras et l’amène de l’autre côté.

C’est tout. Rien que ça. Cet homme est entré dans notre vie par une portière et en est ressorti par un passage piéton. Une minute et demi, guère plus. Mais quand il est parti, la petite dizaine de personnes qui attendaient comme moi s’est mise à parler. Du handicap, de la difficulté de vivre dans le noir, de la solidarité. Et aussi, bien sûr, des temps d’attente à la Stib et de son incapacité à assurer de bons transports. Quand mon bus est arrivé, ceux qui en attendaient un autre m’ont dit au revoir. Jamais ça ne m’était arrivé.

On dirait que ne rien voir délie les langues. Ce type avait l’air heureux. Quel dommage qu’il n’ait pu voir les visages qui le regardaient. Il les avait ouverts, ces visages, ces regards, ces sourires. Au pays des gens normaux, les aveugles peuvent être des Kings !

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